Pas si tant
OGRESSES N°3 – Salomé Botella
Salomé Botella
Pas si tant
vedrendi 9 janvier 2026
Taille : 130 mm / 172 mm – 136 p. – 13,5 €
ISBN : 978-2-37756-257-2
On plante, on bêche,
on fait des tas, on fend une bûche,
on roule une pâte.
Salomé Botella rassemble ces gestes du quotidien, ces souvenirs de l’enfance, et dresse le portrait de son adolescence rurale dans un premier roman lucide et tendre, à la forme brève, empreint de l’oralité chère à la campagne où elle grandit.
Pas si tant, c’est l’histoire universelle d’une enfance qu’on quitte, avec ses images, ses lieux et ses personnages. C’est surtout la voix d’une génération, qu’on ne lit pas souvent, qui porte les traces d’histoires et de gestes transmis, et qui s’attarde à mettre en récit ces espaces, leurs façons de dire et leurs façons de faire.
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« Ils (les paysans) n’ont d’autres choix que de reprendre à leur compte la définition (dans sa
version la moins défavorable) qui leur est imposée ou de se définir en réaction
contre elle » – Nina Ferrer Gleize, L’Agriculture comme écriture
La représentation de la ruralité est parfois prise dans une simplification constante : de l’archétype du vide et de l’ennui, à celui du « beauf », du rustre, en passant nécessairement par l’agriculture, avec tous les fantasmes qui s’y rapportent. La littérature elle-même peine à s’en défaire. Comme s’il manquait à la campagne des imaginaires alternatifs qui permettraient à ceux qui y vivent ou qui en viennent de se retrouver dans des récits qui sont les leurs.
Le tableau de Rosa Bonheur, Jeune taureau sautant la barrière, que l’on retrouve en couverture du livre, ne dit pas autre chose. Cette image qui reflète la liberté avec laquelle la peintre traite son sujet contraste avec l’imagerie du XIXe siècle, qui, en figurant la paysannerie dans l’effort, semble réduire la ruralité au travail de la terre.
PRESSE
Coup de coeur libraires
EXTRAIT
Mon daron il a creusé des trous, il a jamais mis de piscine dedans
Il a mis des fosses septiques
Je pense que ça coûte aussi cher que la piscine
Je pense qu’on peut pas se baigner dans la fosse septique
Je pense qu’on va payer la piscine creusée avec les gains de la machine à sous de la fête foraine
Y a quelques années de ça, il avait entrepris de commencer un petit élevage
Ça lui éviterait de tondre la pelouse
Il s’était acheté son premier mouton
Il était parti le chercher avec David
En descendant du Kangoo, on s’était aperçu que l’animal avait des couilles tellement énormes qu’elles touchaient presque par terre
Il avait eu peur de l’emmener chez le vétérinaire
Il pensait qu’on lui demanderait de passer de la pommade dessus
Tout le monde s’était foutu de la gueule du bélier au gros paquet de Stef
Les gens le disaient un peu consanguin sûrement
C’est comme avec la taxidermie
Sur Leboncoin, si tu tries par prix croissant les annonces de têtes de chevreuil empaillées
Tu t’aperçois que plus le prix est bas, plus l’animal est difforme
C’est comme ça que j’ai deviné que grosses couilles avait pas coûté cher
David c’était un type spécial
Avec ses habitudes de célibataire
Chaque matin au réveil, il pissait par la fenêtre de sa chambre
Ça avait fini par faire une grosse trace jaune sur le crépi de sa maison
Un beau jour, son bouc rentra dans la salle de bains pendant qu’il prenait sa douche
Il l’assomma à grands coups de poing
Mais une tête de bouc c’est pourtant bien dur
Il avait dû y mettre du sien
En tout cas ça l’avait couché net
Pauvre bête
Personne lui avait dit qu’il fallait pas rentrer quelque part où David était tout nu
Le mouton bouge dans la paille,
David et Stef sont pas trop de deux pour lui passer la tondeuse
Il est caché derrière leurs torses nus
Le bronzage paysan,
Un bronzage qui concerne pas mal de monde au final
Un bronzage qui part de la main, s’arrête à l’épaule et encercle le cou
Un bronzage rose qui suit les contours d’un t-shirt
Qui laisse apparaître des épaules blanches sous un marcel,
Des aisselles timides et des poils drus
En France, une cabane de jardin est non imposable si sa surface de plancher et d’emprise au sol sont inférieures à 5 m2,
Ici on construit plein de cabanes, mais petites,
On habite le jardin plus que la maison
Je dors dans la caravane humide l’été
Les garçons dans les tentes installées en ronde
La maison sert à tirer l’électricité douteuse
Stéphane branche rallonge après rallonge, méthodiquement
Chacun peut charger l’iPhone que mamie lui a acheté
Tout le monde est content
Un jour on va tout faire sauter
Mon père pouvait être très tendu parfois
Petite il disait qu’il fallait qu’on se méfie de moi
Sur une vidéo on entend
« Faites attention Marie-Laure, elle va finir par vous avoir »
Parfois on fait un enfant et c’est une piètre menteuse
Une fille qui dit qu’elle dort chez Clémence
Mais qui dort pas chez Clémence au final
Une fille comme ce voisin, qui déplace la clôture d’un mètre par un mètre chaque année pour gagner du terrain
Qui avance petit mensonge par petit mensonge pour finir par faire la très grosse bêtise
Sa Twingo se faisait surnommer « la météorite »
Elle avait des sortes de gros cratères qui semblaient être des impacts sur le capot avant
Comme beaucoup des véhicules de Stef elle était immobilisée dans le jardin, faute de pouvoir rouler
Ensevelie dans une herbe tellement haute, presque fossilisée
C’était ça au fond papa
« Le sens des bonnes affaires »
Celui-là même qui vous pousse à acheter 5 voitures à bas prix qui marchent tant bien que mal








































































