Par une forêt obscure

OGRE N°11 – Maurice Mourier

Maurice Mourier

Par une forêt obscure

 

jeudi 14 avril 2016
Taille : 140/185 mm – 272p. – 20€
ISBN : 979-10-93606-32-3

Quelque part à la campagne en France, un enfant vit avec sa grand-mère. C’est la guerre. La seconde. Un homme, un « cousin », vit en secret dans la resserre. De la guerre, on ne parlera pas, ou très peu. Elle est là, c’est tout, comme un bruit de fond. On parlera en revanche du quotidien de cet enfant, de ses rapports à la nature, aux lieux et aux animaux, de la relation d’amitié quasiment silencieuse qu’il nouera avec ce « cousin », et, surtout, du personnage de la grand-mère, une pied-noir immigrée à Paris au franc parler et au courage exemplaire qui plane sur tout le roman en y infusant sa lumière. C’est un ange qui, grâce à ses récits et sa langue métissée (mélange de patois des campagnes françaises, d’arabe et d’argot parisien) réussit à enchanter le monde et en faire un lieu d’accueil.

Loin d’un récit autobiographique ou d’un récit de guerre, Par une forêt obscure est un récit d’enfance. Mais non pas un récit de souvenirs d’enfance, cette revisitation où nous sélectionnons, mettons en forme et en images nos souvenirs, et trahissons notre sensibilité d’alors avec toute la distance dont est capable notre esprit d’adulte. Ce que réussit Maurice Mourier est beaucoup plus rare, pour ne pas dire extrêmement difficile : il restitue de manière extraordinaire ce que c’est qu’être enfant, et plus particulièrement ce rapport extrêmement étrange que nous pouvons entretenir au temps, un temps qui s’accélère ou ralentit selon des logiques mystérieuses, ou un été dure des années et quatre années scolaires une nuit. Comme si Maurice Mourier avait su conserver dans son esprit, intactes, ses impressions d’alors, et nous les restituer dans toute leur lumière et leur innocence.

 

LA PRESSE

 

« Entretien avec Maurice Mourier », par Hugo Pradelle, En attendant Nadeau, 29 juin 2016 : On monte en épingle les choses de tous les jours alors que, pour moi, la littérature consiste justement à s’en évader, à s’en séparer, à s’en disjoindre. C’est un moyen de refuser le réel, de l’oublier aussi, un peu. Et je préfère qu’on me raconte une histoire, une vraie même, mais à condition que l’imagination y joue un rôle capital, plutôt que de me raconter la trivialité quotidienne. C’est l’imagination « maîtresse d’erreur et de fausseté » qui me paraît la clef véritable de la littérature.

 

« Par une forêt obscure, Maurice Mourier », par Lou Darsan, Lou et les feuilles volantes, 25 mai 2016 : La beauté fluide de l'écriture de Maurice Mourier restitue toutes choses avec une sensualité, une sensitivité, exacerbée, précise et délicate. (…) Le roman ne s'impose pas par la force, mais s'infuse avec douceur et en profondeur dans l'imaginaire, à la surface duquel, longtemps après la lecture, les images et les émotions affluent de nouveau. Lire plus

 

EN PARLE

 

« Tu étais ce petit garçon sous l'Occupation », par Bertrand Leclair, Le Monde des Livres, 30 juin 2016 : Au présent d’une phrase souple et limpide, le tutoiement crée une distance affective entre l’auteur et son personnage pour y faire surgir un passé enfoui avec une rare puissance d’évocation, et ce sont des sons, des ­gestes, des lumières, des odeurs âcres ou légères, toujours perçues à hauteur d’enfant, qui jaillissent dans la profusion d’un texte aussi enlevé qu’il est imagé. 

Le lecteur se souvient alors que l’auteur, dont les romans précédents ont souvent tiré du côté du fantastique ou de la science-fiction, n’a pas été ­seulement un remarquable critique à La Quinzaine littéraire, mais aussi un cinéphile érudit. Le paradoxe est que son livre, pour être impossible à adapter, emporte comme un film tourné caméra sur l’épaule, avec une science du cadrage et du montage si naturelle qu’elle semble intuitive. Quand la littérature prétend reprendre au cinéma son bien, sur le terrain de ­l’enfance.

 

« Par une forêt obscure », par Nikola, « Paludes », Radio Campus Lille, 13 mai 2016

 

EXTRAIT


Écraser au revers des feuilles frisées, vert bouteille, des plants de pommes de terre, les plaques jaune safran qu’y déposent les doryphores en tenue camouflée, rayée de kaki, et se salir les doigts au jus collant de leurs œufs en suave omelette.

Pourchasser au soir tombant les hannetons patauds : ils lancent d’un buisson l’autre la basse bruyante de leur moteur.

Rouler et te rouler dans la prairie qui moutonne en pente vers le ru.

Jeter soudain un corps fourmillant de sèves dans la terre tout juste bêchée du potager, te retourner face au ciel, fermer les yeux tant la lumière est forte, appuyer ton dos contre l’axe du monde et éprouver en chaque fibre la sensation enivrante qu’il tourne sans à-coups et t’entraîne sur sa puissante machine pour un manège éternel.Lire plus